Novembre 2013
Je me sens vide, aigrie, désabusée, totalement épuisée. Je ne sens plus aucune motivation au travail ni ailleurs. Je n’ai plus l’impression de me soucier de mes clients (je suis intervenante en santé mentale!). J’ai seulement envie de m’engueuler avec tout le monde.
L’ambiance générale est lourde, mon humeur atroce n’aide en rien, ma mauvaise foi non plus. J’essaie de voir le bout, alors que je ne vois même pas la fin de mes journées. Je me cherche, je n’arrive à rien. Je me sens comme une fille qui a joué un rôle toute sa vie, une fille qui vient de retirer son costume de scène pour la première fois et qui ne sait pas qui elle est en dehors de ce personnage. Je suis fatiguée. Je n’ai pas envie de voir personne et je ne sais pas trop pourquoi. Un mélange de honte et de nonchalance me prend d’assaut. Je regarde la fille sans masque dans le miroir, je ne la connais pas. J’ai l’impression que ce qu’elle veut et ce dont elle a besoin sont à des milles de distance. Et même si elle pense savoir ce dont elle a besoin, elle ne sait même pas comment se rendre là.
Un matin calme de décembre, c’est la crise. Ça explose. Ça déborde de partout. C’est trop. Je quitte le travail alors que je venais d’y arriver. Après des heures d’attentes, un homme en sarrau blanc me remet un tas de papier et me dit : trouble de l’adaptation. J’ai 32 ans, c’est mon deuxième. Déjà.
Les premiers jours, le divan est mon seul compagnon, le seul que j’endure du moins. Films et émissions insipides du matin au soir. Cheveux gommés, migraine et douleurs physiques incommodantes présentes tout le temps. Je ne veux rien et je veux tout. Je ne m’endure pas moi-même, tellement que je m’auto-sacrerais une gifle en pleine tronche. Je me dégoûte, je ne me comprends pas. Une fille que j’admire et qui tient un site web sur le mieux-être se cherche des gens pour leur faire des traitements d’hypnose. Elle suit une formation en hypnothérapie et elle a besoin de se pratiquer. Je la trouve lumineuse et fascinante cette fille-là, j’ai besoin d’une lumière comme celle-là pour m’aider à me relever. La mienne est brûlée depuis longtemps.
S’ensuit une série de rencontres qui m’amènent à m’exercer à gérer mon anxiété, à guérir des blessures du passé et des vieux patterns acquis à l’enfance, à travailler sur ma confiance et mon estime de moi, à apprendre à lâcher prise et à ne plus me soucier de l’opinion des autres. Cette amie me parle de livres qui l’ont aidée, elle m’en prête, je prends notes des titres des autres, je les achète. Je consulte aussi une psy, parce que t’sais…
Au fil du temps, je m’installe un coin à méditation chez moi. Je lis sur le sujet, ainsi que sur l’alimentation vivante, le bouddhisme, l’ayurvéda, je participe à une retraite de yoga, je deviens principalement végétarienne… Je retourne au travail. Je vais mieux, beaucoup mieux, mais je sais que quelque chose de plus grand m’attend. En fait, il faut que quelque chose d’autre m’attende. Ma vie ne peut être que ça, c’est pas assez. J’ai trop de passions non stimulées en ce moment; dont l’écriture et la photographie, trop de buts, d’intérêts, de rêves, d’endroits où aller, de choses à essayer… Je ne peux me contenter de faire un seul et même travail toute ma vie, j’ai trop d’aspects à stimuler. Je viens enfin de comprendre ça. Je viens surtout de comprendre qu’il faut surtout passer à l’action après avoir compris ça. Le passage à l’action aussi connue comme l’étape où je me rends jamais.
En fait, le trouble de l’adaptation est un cadeau; empoisonné, mais tout de même un cadeau. C’est toute ma vie qui me crie d’arrêter et de me regarder enfin, pour de bon. En fait, ma voix me crie d’arrêter depuis longtemps, mais il y avait un bouton « mute » en service permanent. Mon système vient de lâcher, le « mute » ne marche plus. Ça crie fort. Je me demande comment j’ai réussi à taire ce cri là pendant des années. Ce cri là que j’entends maintenant, il veut que je m’arrête pour réévaluer les chemins que j’ai choisi. M’arrêter pour nettoyer les saloperies que mon cerveau a accepté comme des vérités, comme mes désirs alors qu’ils ne m’appartiennent aucunement.
Je me sens renaître, littéralement. Je ne reconnais plus certaines de mes façons de penser totalement transformées par l’hypnose. C’est magique! J’ai des frissons tellement je me sens excitée et fascinée. Je n’en veux plus à un tas de gens grâce à des histoires réglées par une régression que mon amie m’a fait faire en hypnose. Je comprends un tas de choses que je n’avais pas compris avant. Je sais pas trop comment expliquer cette nouvelle compréhension à vive allure. Comme si on m’avait permis d’apprendre des leçons sans d’abord faire les devoirs. Je sens mon état mental se modifier grâce aux changements que je fais dans mon mode de vie, grâce aux lectures, aux méditations, aux visualisations, aux histoires inspirantes que je lis, que j’entends.
Avant, je n’avais pas la vie que je voulais et je n’ai rien fait pour changer ça. Quand on saisit tout ça, on ne peut plus reculer… on ne veut plus reculer. J’ai rempli ma boîte à outils durant de nombreux mois, il en manque encore, il en manquera toujours certains, mais les principaux sont là. Il s’agit simplement d’avoir la confiance de les manier ou du moins, d’apprendre à les utiliser petit à petit.
Et puis, j’apprends à voir la beauté des gens, à focuser là-dessus avant de voir les défauts, ce qui est plutôt contraire à mes habitudes. Je réalise à quel point il y a des gens extraordinaires dans mon entourage, des gens qui me donnent une dose de motivation pour ma propre vie par leurs actions et réussites. Des gens résilients, qui en ont bavé et qui gardent la tête haute. Des gens que je n’envie plus, mais plutôt de qui je veux m’inspirer. Puis, je comprends que les gens heureux veulent rendre les autres heureux à leur tour. Les véritables gens heureux ne se nourrissent pas du malheur des autres, ils tendent la main aux malheureux pour leur transmettre leur richesse sans prix. Ils ne regardent de haut que s’ils tendent la main aux autres pour les aider monter la pente à leur niveau. Ils sont d’une immense générosité, d’une écoute incroyable, d’une présence si lumineuse qu’ils réchauffent tout autour. Ces gens-là doivent être connus. On se doit de les faire connaître aux autres, à ceux qui sont en quête comme moi, à ceux qui se sentent vides, à ceux qui ont besoin d’un coup de pouce pour surmonter une dure épreuve. Ce serait si égoïste de garder ces gens-là pour moi toute seule.
Je me rends compte qu’en allant bien, on a envie de créer, de stimuler nos passions, de les faire vivre. Je m’ennuie tant de la photo et de l’écriture. Il faudrait bien que je me trouve un projet en lien avec tout ça…
Tiens, je vais l’appeler Portraits.
Crédits photos: Pinterest et mon album personnel
Bon ça y est je pleure à plus finir… ouf… je vais imprimer ce texte et le lire et relire jusqu’à ce que les mots me coulent dans les veines. Ainsi peut-être aurai-je le courage d’aller au bout de mes passions et de mes convictions moi aussi. Merci d’être la personne qui m’inspire moi…